Drew Estate Undercrown

Drew Estate Undercrown, marque de l’année pour le Cigaroscope 2018

Par supercigare,
le 12 octobre 2018

Plébiscités aux États-Unis et en Europe, les cigares Drew Estate Undercrown ont fait une prestation particulièrement réussie cette année. L’occasion de revenir sur l’histoire de ce label nicaraguayen, né à Manhattan…

Par Arthur Bourdeau

1995, un dimanche matin d’hiver, en plein cœur de Manhattan. Deux amis, Jonathan Drew et Marvin Samel, inaugurent leur kiosque à cigares : un point de vente « de la taille de [son] bureau », ironise Samel, et le point de départ de l’aventure Drew Estate. Dans le microcosme new-yorkais, la notoriété de l’affaire grimpe vite avant que le mois d’octobre 1996 sonne, déjà, la fin du rêve lorsque l’ouragan Mitch dévaste l’Amérique centrale et ravage le Honduras et le Nicaragua. Le bilan est terrible : dix-huit mille morts, des centaines de routes impraticables et une agriculture réduite à néant. « Nous n’avons pas vendu un seul cigare pendant près de huit mois, déplore Samel. Notre conseiller financier a joué franc jeu et nous a dit : “Les gars, c’est terminé.” »

La Gran Fábrica

Au lieu de persévérer du côté de la Grande Pomme, Jonathan Drew prend son baluchon, direction le Nicaragua. En quelques mois, il met sur pied une nouvelle fabrique et rencontre Scott Chester, sa bonne étoile. La société de ce designer industriel, la Arielle Chester Industrial Design, lui donne l’idée de lancer la ligne ACID. « Les ventes sont confidentielles mais cette signature représente une part importante de notre chiffre d’affaires. » Près de la moitié en fait. Ces cigares aromatisés que Drew cherche à anoblir en les qualifiant de « cigares infusés » (infusions aux huiles, aux herbes et même au vin rouge) vont en effet faire la réputation de la marque. Son succès aussi. « Certains, dans l’industrie du cigare, passent leur temps à copier ce qui existe déjà, confie José Orlando Padrón, l’un des mentors de Drew. J’admire Jonathan car il a osé développer des idées qui sortent de l’ordinaire. »

Une singularité que l’on retrouve dans l’univers qu’il crée de toutes pièces au sein de La Gran Fábrica Drew Estate, la plus grande manufacture du Nicaragua, inaugurée en 2007.

Undercrown, créé par les torcedores

En 2008 sort le Liga Privada, une ligne « super-premium » qui séduit et participe à la renommée de l’entreprise en touchant une clientèle plus traditionnelle que les ACID. Les rouleurs peuvent les consommer gratuitement pendant leurs heures de travail… Seulement, ces cigares coûtent cher à produire et la générosité des patrons commence à menacer l’équilibre financier. Jonathan Drew, habile, dégaine alors une idée de plus de son génial chapeau : faire fabriquer par ses rouleurs une nouvelle gamme qui sera la leur. C’est la naissance d’Undercrown. Depuis 2014, Drew Estate a été racheté par le groupe Swisher International. Ses dirigeants, bien sûr, restent aux commandes. Voici un extrait de l’interview qu’il nous avait accordée, il y a 3 ans…

L’Amateur de Cigare : José Orlando Padrón vous appelle affectueusement « el Gringo Loco », un surnom qui vous plaît ?

Jonathan Drew : Je dois avouer que je suis content d’être reconnu comme le premier « rude boy gringo » d’Estelí. J’ai beaucoup de respect pour Orlando Padrón. Il m’a beaucoup influencé durant ces dix-huit années de carrière.

L’ADC : La plupart des producteurs de cigares viennent de Cuba, du Nicaragua, du Honduras, de la République dominicaine… Vous, vous avez commencé à New York. C’est un atout ou un handicap ?

J. D. : Un atout, c’est évident ! Je viens de New York, mes parents sont de Brooklyn. Nous sommes des battants, nous ne baissons jamais les bras devant l’adversité. J’ai également en moi une touche d’Amérique latine après avoir vécu si longtemps au Nicaragua. L’entreprise Drew Estate prône la diversité, c’est ce qui la rend forte et difficile à arrêter. Notre président, Michael Cellucci, est un Italien de Philadelphie… vous voyez !

L’ADC : Vous avez dit : « Si tu essaies de faire un cigare que tout le monde apprécie, alors tu ne feras jamais un cigare que quelqu’un aime. » Expliquez-nous.

J. D. : En fait, c’est notre ancien président qui a dit cela mais cette phrase signifie beaucoup pour moi. Ça veut dire que si notre devoir est de faire des cigares d’une qualité incroyable, nous ne devons pas prêter attention aux quelques idiots qui donnent leur avis sur tout. Si tu essaies de faire quelque chose pour plaire à tout le monde, tu te plantes à coup sûr. Il est préférable de suivre son cœur et son instinct.

L’ADC : Les Liga Privada et les Undercrown rencontrent un franc succès. Elle est vraie, cette histoire qui dit que les Undercrown ont été inventés par vos rouleurs ?

J. D. : Oui, je vous assure ! La gamme Undercrown n’était qu’une suggestion au départ, mais nous l’avons tout de suite adoptée. Désormais, c’est une valeur sûre de notre marque et elle est là pour durer. Puis-je vous suggérer d’essayer également les Kentucky Fire Cured ? Ils sont tellement bons ! J’insiste : tellement bons… Fumés, tourbés… Ces cigares sont un don du ciel.

L’ADC : L’une des lignes Undercrown a été baptisée ShadyXV en référence à Eminem. Vous revendiquez cette influence hip-hop ?

J. D. : Nous avons effectivement des accords commerciaux avec Shady Records, la compagnie dirigée par Eminem et Paul Rosenberg. On est une grande famille. Eminem est devenu un proche et Paul, c’est un génie. Je mesure la chance qu’on a de travailler avec eux.

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