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Fin de partie pour les « havanes marocains »

Par La rédaction,
le 21 juin 2021

Les cigares prétendument composés à 100% de tabac marocain n’ont plus le droit de s’appeler « Habanos »

L’aventure des « havanes marocains » a été renversée par un jugement du tribunal de commerce de Casablanca, qui a condamné l’homme d’affaires marocain Mohamed Zehraoui, qui ne pourra désormais plus utiliser le nom de « habanos » pour commercialiser ses « puros 100% marocains », selon les premiers éléments de l’arrêt consulté par l’agence de presse espagnole Efe.

Mohamed Zehraoui avait trouvé une faille légale en 2011 et avait enregistré le nom de « Habanos S.A. » au Registre du Commerce de Casablanca, profitant du fait que la société cubaine du même nom n’avait pas enregistré la marque dans ce pays.

L’affaire en est restée là pendant plusieurs années, mais en 2019 Zehraoui est passé à l’offensive : il a commencé à fabriquer ses propres cigares localement, avec du tabac marocain, et à les proposer aux magasins haut de gamme. Il est même allé plus loin en dénonçant La Casa del Habano, franchise cubaine, pour avoir ouvert un magasin à Casablanca en « usurpant » le nom qu’il avait déposé.

La justice marocaine lui a donné raison dans un premier temps et a engagé des poursuites contre La Casa del Habano, mais la Société marocaine des tabacs (SMT), importateur exclusif des cigares cubains au Maroc, a alors engagé une patiente bataille juridique qui vient de porter ses fruits. Discrètement, et sans se faire voir, la cubaine Habanos S.A. a soutenu les efforts de la SMT, craignant que dans le reste du monde d’autres hommes d’affaires ne suivent l’exemple de Zehraoui.

Un contexte géopolitique particulier

Lundi 14 juin, le tribunal de commerce de Casablanca a annulé le nom inscrit en 2011 au Registre du Commerce, exigé que le nom « Habanos S.A. » soit effacé de l’Office marocain de la propriété industrielle, et a ordonné à l’homme d’affaires de publier la décision dans deux journaux nationaux, l’un en arabe et l’autre en français.

Le conflit juridique se déroule également dans un contexte géopolitique particulier. « Les Cubains financent le Front Polisario [guerilla sécessionniste du sud du Maroc]. Si un jour ils rompent avec le Polisario, alors je prendrai le nom de ma société et je l’appellerai simplement HaHa », avait notamment déclaré Mohamed Zehraoui.

Cette même semaine, parallèlement au jugement du tribunal de commerce, un tribunal correctionnel de Casablanca a condamné la société Zehraoui à une amende de 40 millions de dirhams (4 millions d’euros) pour divers délits liés au non-paiement des droits d’importation, l’inexistence de pièces comptables et la non-déclaration de production.

Mohamed Zehraoui et son fils Moulay Omar sont apparus à profusion dans divers organes de presse ces dernières années, mais tous les reportages avaient une odeur publicitaire suspecte. Personne n’a jamais pu voir les champs de tabac ou les usines. En fin de compte, le soupçon demeure que tout se résumait à un nom.

 

Laurent Mimouni (avec Efe)