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Comment Quai d’Orsay est devenue un atout stratégique pour Habanos ?

Par supercigare,
le 30 juin 2017

Longtemps ignorée par le reste du monde, la marque Quai d’Orsay est aujourd’hui relancée grâce à deux vitoles qui seront disponibles en 2018. Pourquoi et comment Quai d’Orsay a-t-elle redoré son blazon ?

Lancée en 1969 par Valéry Giscard d’Estaing, alors ministre des Finances, elle est élaborée en 1971 par Gilbert Belaubre, ingénieur de la Seita, et apparaît sur le marché français en 1974. Quai d’Orsay, hélas, n’a jamais réussi à s’imposer. Pire : délaissée par les amateurs français eux-mêmes, jugée quantité négligeable par les producteurs cubains, dépouillée de presque toutes ses vitoles, elle semblait jusqu’à récemment vouée à disparaître. « Existe-t-il une âme charitable pour sauver Quai d’Orsay du naufrage ? » écrivait le Havanoscope il y a sept ans. Appel entendu : lancées en 2012 avec l’Embajador et portées à bout de bras par Antoine Bathie, directeur Cigares de la Seita, les Éditions régionales françaises qui se sont succédé presque tous les ans depuis ont sauvé Quai d’Orsay d’une mort certaine. Mieux, leur succès dans l’Hexagone a fini par titiller les Cubains. « L’intérêt porté à ces Éditions régionales nous a fait comprendre que Quai d’Orsay avait du potentiel », reconnaît José M. López. Il était temps.

Un paradoxal revers de fortune

Mais, outre cette reconnaissance officielle en forme d’amende honorable, le label a un autre atout, et non des moindres. Son insuccès et son manque de notoriété n’ont pas incité les producteurs étrangers à la commercialiser sur le territoire américain comme ils l’ont fait avec toutes les autres marques de havanes. Aujourd’hui, en effet, les grands groupes tabacoles ont acquis les droits de tous les labels cubains auprès des familles qui les détenaient ou les ont déposés aux États-Unis. C’est ainsi qu’on trouve dans ce pays où les havanes sont interdits d’importation des Partagas, Montecristo, Romeo y Julieta, etc., fabriqués en République dominicaine ou au Nicaragua. L’État cubain a d’ailleurs mené une très longue bataille juridique pour interdire au groupe General Cigar l’usage de la marque Cohiba. Peine perdue : l’an dernier, la Cour suprême a tranché en déniant à Tabacuba, l’entreprise tabacole cubaine, le droit d’ester en justice sur le territoire américain. Rien de tel pour Quai d’Orsay. Le label n’étant pas aujourd’hui un nom commercialisé aux États-Unis, les Cubains pourraient en disposer comme ils l’entendent le jour où l’embargo sera levé. Ainsi, naguère méprisée, la marque au nom si français est devenue stratégique.

Une gamme prometteuse

Habillés de frais, ceints d’une bague réjouissante et moderne, composés d’une liga bien plus dense et expressive qu’autrefois, les nouveaux Quai d’Orsay ont tout pour réussir. Les deux vitoles inédites, les N° 52 et N° 54, composent, avec le Corona Claro lui aussi revisité, un séduisant petit catalogue de trois pièces qui sont attendues avec impatience, et pas seulement en France.

Sachons néanmoins discipliner notre impatience. Les nouveaux havanes présentés au Festival del Habano fin février ne seront pas disponibles sur le marché avant, au mieux, la fin de l’année, voire le premier trimestre 2018. En effet, c’est en juin, que les distributeurs du monde entier passent leurs commandes et c’est seulement au vu de ces commandes que le plan de production sera établi et que la fabrication démarrera dans les manufactures. De plus, les distributeurs ne reçoivent pas en une seule fois l’intégralité de leurs commandes pour chaque vitole et certains préfèreront en avoir reçu suffisamment avant de fournir les civettes de leur territoire. Souvenons-nous que nous venons de voir apparaître en France le Cohiba Medio Siglo, un module lancé à La Havane en février 2016. Tout vient à point…

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[1] Il a depuis été remplacé par Ernesto González.

[2] On parle de Leopoldo (Polito) Cintra, actuel vice-président commercial et fils de Leopoldo (Polo) Cintra, l’actuel ministre de la Défense.