FDA

USA/FDA : un espoir pour les amateurs ?

Par supercigare,
le 15 février 2018

La plupart des producteurs de cigares ont ardemment souhaité la victoire de Donald Trump. Selon eux, l’administration de Barack Obama a imposé beaucoup trop de réglementations à leur industrie. Qu’en est-il ?

 Par Guillaume Renouard

 

Depuis le mois d’août 2016, un climat morose règne parmi les producteurs et amateurs de cigares américains. De nouvelles réglementations draconiennes imposées par la Food and Drug Administration (FDA), l’agence chargée de veiller à la santé publique, imposent de lourdes démarches administratives aux fabricants. Un changement qui, selon ces derniers, risque de pénaliser les petits producteurs et d’entraîner une réduction drastique de l’offre pour le consommateur.

Tout commence véritablement en juin 2009, date à laquelle le Tobacco Control Act est voté par le Congrès américain. « Cette loi confère à la FDA l’autorité pour réguler les produits du tabac, catégorie qui englobe tous les produits conçus à base de tabac ou dérivés de celui-ci », explique Azim Chowdhury, conseiller juridique spécialisé. Dans un premier temps, le Tobacco Control Act limite le champ de compétence de la FDA à certains produits bien particuliers, à savoir les cigarettes et le tabac à rouler, à priser ou à chiquer. Les cigares ne sont donc pas inclus.

Le 8 août 2016, coup de tonnerre au sein de l’industrie du cigare : la FDA choisit d’étendre la réglementation à l’intégralité des produits du tabac – la loi lui en laissait la possibilité –, dont les pipes à eau, les cigarettes électroniques et les cigares. Parmi les réglementations mises en place par le Tobacco Control Act, la plus controversée est celle qui instaure un processus de validation préalable à toute mise sur le marché de nouveaux produits.

Un processus de validation décourageant

La loi stipule ainsi que tout cigare mis sur le marché ou modifié après le 15 février 2007 doit être examiné et validé par la FDA. Le texte prévoit à l’origine que les cigares lancés entre le 15 février 2007 et le 8 août 2016 aient jusqu’au 8 août 2018 pour être approuvés par la FDA – la date butoir a été depuis repoussée au 8 août 2021. Les cigares lancés après le 8 août 2016, eux, doivent obligatoirement passer par ce processus de validation avant d’être mis sur le marché.

Concernant le processus de validation, deux possibilités s’offrent aux producteurs de cigares, selon Azim Chowdhury. « La première consiste à remplir un rapport d’équivalence substantielle. Il s’agit de l’option la plus simple. Elle implique de comparer le nouveau produit à un produit déjà disponible avant le 15 février 2007 et de démontrer qu’il n’est pas plus dangereux. La deuxième option, baptisée Premarket Tobacco Product Application, est bien plus difficile légalement. Elle nécessite de prouver que le nouveau produit est “approprié pour la protection de la santé publique” via, par exemple, des essais cliniques concernant sa composition. »

Une mesure à 17 millions de dollars

Du côté des producteurs comme des aficionados, on s’insurge contre cette lourde procédure, qui ferait peser un danger conséquent sur la variété et la qualité de l’offre. Pour Jacob Grier, amateur de cigares et journaliste indépendant, qui collabore notamment à Slate et The Atlantic, elle risque de tourner au casse-tête juridique pour les fabricants. « Les cigares se voient désormais soumis à un processus lourd et vague visant à prouver qu’ils ne sont pas plus dangereux que d’autres produits existants. Dans le cas des cigarettes, cette obligation a donné lieu à des délais de plusieurs années pour mettre de nouveaux produits sur le marché. Selon les estimations de la FDA, compléter un rapport d’équivalence substantielle demande pas moins de trois cents heures aux producteurs. Et cette estimation ne prend pas en compte les données cliniques que les producteurs pourraient être tenus de rassembler. Ainsi, toujours selon la FDA, les coûts, pour l’industrie du cigare, seront de 17 millions d’ici août 2018 et de quatre millions supplémentaires chaque année suivante. »

Toujours selon Jacob Grier, cette réglementation renforcée va immanquablement se traduire par un appauvrissement drastique de l’offre et par une mise sur le carreau des petits fabricants, au profit des grands noms de l’industrie. « La nécessité de coller à ces réglementations va accroître le coût que représente l’introduction de nouveaux cigares, et ainsi très certainement réduire la diversité de l’offre. Ce seront moins de nouveaux cigares qui seront mis sur le marché et ils seront proposés sous un nombre de modules plus réduit. En outre, les producteurs les plus prospères bénéficieront bien évidemment d’un avantage concurrentiel, puisqu’ils seront à la fois capables de financer les recherches et de se doter de l’expertise juridique nécessaire pour naviguer parmi les contraintes juridiques », prévoit-il.

Cigares et Trump, même combat ?

Pour limiter la casse, l’industrie a dans un premier temps suggéré à la FDA d’exclure les cigares premium, roulés à la main, de ce processus de validation, mais cette proposition a été rejetée. Malgré tout, les aficionados conservent l’espoir de voir la FDA s’adoucir et de parvenir à un compromis sur les cigares roulés à la main. Cet espoir repose notamment sur Scott Gottlieb, un ancien médecin placé à la tête de la FDA par l’administration Trump en juin 2017. Selon Jacob Grier, ce dernier a d’ores et déjà montré une plus grande souplesse dans le dialogue. « Avec Scott Gottlieb, la FDA a changé de position sur les cigarettes électroniques et elle semble adopter une approche bien plus raisonnable et factuelle pour leur réglementation. »

La FDA travaille en effet actuellement sur une législation visant à inciter les fumeurs à passer à la cigarette électronique en réduisant la quantité de nicotine maximum autorisée dans les cigarettes traditionnelles. Un changement par rapport à la politique précédente de la FDA, qui refusait de présenter la cigarette électronique comme une alternative plus saine. « Il est possible que la FDA adopte également une approche plus pragmatique sur les cigares, bien qu’il n’y ait pas vraiment de signes allant dans ce sens pour le moment », conclut Jacob Grier. Un espoir partagé par de nombreux aficionados.

 

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Le Tobacco Control Act

  • Juin 2009 : Le Congrès américain confie à la FDA le soin de réguler l’industrie de la cigarette grâce au vote du Tobacco Control Act, qui impose aux fabricants un processus de validation pour tous les nouveaux produits mis sur le marché.
  • Août 2016 : La FDA choisit d’étendre cette réglementation à l’industrie du cigare.
  • Depuis 2016 : Le Tobacco Control Act s’impose à tous les producteurs de cigares, qui tentent de faire exclure le cigare premium de la réglementation.
  • Juin 2017 : Nomination de Scott Gottlieb, proche de Donald Trump, qui semble prêt à ouvrir le dialogue avec les producteurs de faits main.

 

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Les contraintes de mise sur le marché américain

  • Cigares mis sur le marché avant le 15 février 2007

Recensement sans processus de validation par la FDA.

  • Cigares mis sur le marché entre le 15 février 2007 et le 8 août 2016

Autorisation de mise sur le marché provisoire en attendant la validation de la FDA qui doit avoir lieu avant le 8 août 2021.

  • Cigares mis sur le marché après le 8 août 2016

Interdiction de mise sur le marché avant validation par la FDA.