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FDA : « La science nous a donné raison »

Par guillaume renouard,
le 16 août 2023

Après la victoire de l’industrie du cigare premium face à la FDA aux Etats-Unis, L’Amateur a interrogé Mike Copperman, directeur de la réglementation fédérale et de la législation de Cigar Rights of America (CRA), l’un des groupes de pression qui se sont battus contre l’agence fédérale sur ce dossier.

Propos recueillis par Guillaume Renouard, correspondant aux Etats-Unis

 

L’Amateur de Cigare : Le tribunal de Washington DC a tranché en votre faveur contre la FDA en exonérant les cigares premium des réglementations que celle-ci a introduites depuis 2016. Quelle est votre réaction ?

Mike Copperman : Une immense satisfaction ! C’est l’aboutissement d’une longue bataille juridique qui a duré sept ans. Les choses ont même vraiment démarré en 2007, lorsque nous avons été avertis de la menace de nouvelles taxes sur les cigares premium. Sur le plan juridique, nous savions que nous allions devoir placer la barre très haut pour l’emporter, car une fois que le Congrès délègue de l’autorité à une agence régulatrice, les tribunaux reviennent très rarement sur cette décision.
Nous savions donc que nous allions devoir présenter des preuves solides en matière d’épidémiologie afin de justifier l’exemption pour les cigares premium, ce que nous avons su faire, et le tribunal nous a donné raison en affirmant que la FDA n’avait pas su tenir compte des données scientifiques que nous lui avons transmises. Il est très gratifiant de voir que la science et la raison peuvent l’emporter, et on espère désormais que la FDA va revenir à une approche scientifique, pragmatique et apolitique, car une agence de santé publique ne peut se permettre d’être partiale. Bien sûr, la victoire n’aurait pas été possible sans les fabricants, vendeurs et amateurs qui ont soutenu nos efforts depuis le début.

L’ADC : Qu’est-ce qui a conduit le tribunal à trancher en votre faveur, selon vous ?

M.C. : Le premier élément déterminant a sans conteste été les données scientifiques que nous avons fournies et qui justifient de traiter les cigares premium indépendamment des autres produits du tabac. Vingt-cinq ans de recherche ont permis de prouver – et ces informations viennent de l’Institut national du cancer, pas de nous – qu’en matière de mortalité, de morbidité et de consommation chez les plus jeunes, les cigares premium ne posent pas du tout les mêmes risques que les autres produits du tabac. Un fait que la FDA n’a pas su prendre en compte. La science nous a donc donné raison.
Ce qui nous amène à la deuxième raison. La FDA est tenue de respecter un certain nombre de règles. En particulier, elle doit prouver, pour chaque nouvelle régulation mise en place, que les bénéfices au niveau de la population seront supérieurs aux coûts entraînés. Or, dans le cas présent, elle n’a pas su le démontrer – pour la bonne raison que ça n’aurait pas été le cas -, et n’a donc pas respecté son mandat.

L’ADC : Ne craignez-vous pas que la FDA fasse appel de la décision et relance ainsi la bataille juridique ?

M.C. : Il est naturellement difficile de prédire l’avenir et nous ne sommes qu’au début du délai de 60 jours dont le gouvernement fédéral dispose pour faire appel. Toutefois, il est à mon avis peu probable qu’il le fasse. En effet, d’après l’aveu de la FDA elle-même, la régulation des cigares faits main n’est pas sa priorité, notamment parce que l’agence cherche à protéger le jeune public, et que celui-ci ne fume pas de cigares premium. À l’inverse, la hausse de la vape chez les jeunes a de quoi inquiéter la FDA, il est donc à mon avis probable qu’elle se concentre désormais sur cette bataille-là.
Si l’on ajoute le fait que la recherche scientifique récente ne va pas dans le sens de la FDA – une étude de la Society for Research on Nicotine and Tobacco publiée cet été montre par exemple que les cigares premium génèrent une dépendance bien moindre que les autres produits du tabac -, investir de nouvelles ressources dans une bataille qu’elle risque de perdre à nouveau serait peu prudent de sa part. Mais on m’a appris à ne jamais dire jamais.

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